La chaîne Al jazeera virée du Maroc


Le ministère de la Communication a décidé de «suspendre les activités de la chaîne Al Jazeera au Maroc et d’annuler les accréditations de son staff au Maroc». Cette décision a été prise après  plusieurs cas de violations par la chaîne des règles du travail journalistique de précision et d’objectivité.
Le ministère a relevé que le traitement «irresponsable» réservé aux affaires marocaines «a sérieusement altéré l’image du Maroc et porté manifestement préjudice à ses intérêts supérieurs, à leur tête la question de l’intégrité territoriale qui jouit d’une unanimité nationale inébranlable parmi toutes les catégories du peuple marocain».
En plus des manquements professionnels répétés que traduit le traitement quotidien négatif des affaires marocaines par Al Jazeera, la chaîne «a fait entrer des équipements techniques dans notre pays sans les autorisations légales nécessaires de la part des départements gouvernementaux compétents», selon le ministère de la Communication.
Dans un communiqué publié samedi, Al Jazeera a condamné la décision des autorités marocaines et assuré qu’elle s’en tenait à «sa politique éditoriale». La chaîne compte même porter l’affaire devant le tribunal administratif comme elle l’avait fait pour le refus d’accréditer deux de ses journalistes. Cette affaire a été reportée à jeudi.
Selon une source autorisée au ministère de la Communication, parmi les points de discorde avec le bureau de Rabat d’Al Jazeera et le département, figure l’utilisation d’une liaison Internet pour la transmission d’images sans autorisation de l’Agence nationale de réglementation des télécommunication (ANRT) et le tournage de documentaire sans autorisation du ministère de la Communication.
Selon la même source, il y a quelques mois, le directeur du bureau d’Al Jazeera à Rabat, Abdelkader Kharroubi, a été convoqué par le directeur général de la communication Abdelilah Tahani pour lui signifier les remarques du côté marocain sur la couverture, par le bureau d’Al Jazeera à Rabat, de l’actualité au Maroc.
«Depuis deux années, la couverture d’Al Jazeera donne une image négative du Maroc sans le moindre respect des règles professionnelles et de la déontologie», a affirmé un responsable marocain. «Le Maroc ne demande pas à la chaîne de vendre son image à l’étranger mais d’être objective», a poursuivi la même source.
En mai 2008, les autorités marocaines avaient interdit la diffusion depuis Rabat du journal d’informations maghrébines, confectionné dans la capitale marocaine, pour non-conformité avec la HACA.
En 2006, Al Jazeera avait décidé de lancer un journal télévisé quotidien à partir du bureau de Rabat. Le démarrage officiel du journal du Maghreb avait eu lieu lors d’une cérémonie dans un palace de la capitale où avait été invitée toute la classe politique et médiatique marocaine. Rares avaient été les personnalités de premier rang qui avaient répondu à l’invitation. Le journal du Maghreb de la chaîne Al Jazeera avait soulevé depuis le début la question de la conformité du journal aux directives de la HACA. Pour ce qui est du respect de la pluralité politique, Ahmed Ghazali, le président de la HACA, avait affirmé à la veille des élections législatives du 7 septembre que la HACA comptait sur le professionnalisme et le respect de la déontologie de la part des journalistes du bureau de Rabat. Sur cette question, plusieurs acteurs politiques de gauche accusaient ouvertement Al Jazeera de favoriser les sensibilités proches du courant islamiste au Maroc, et donnaient comme preuve le choix des invités lors du journal du Maghreb, qui sont majoritairement proches des islamistes.
L’opinion et l’opinion adverse, un marché de dupes
Arguant être la chaîne du pluralisme et de la liberté d’expression, le slogan porté par Al Jazeera n’a jamais été respecté à l’intérieur même de la chaîne.
En juin dernier, cinq présentatrices de la chaîne avaient présenté leur démission en raison d’un conflit avec la direction portant, entre autres, sur leur tenue vestimentaire jugée pas assez conservatrice par un responsable de la chaîne.
En juillet 2008, l’ex-président de RSF (Reporters sans frontières), Robert Ménard, avait démissionné du Centre de Doha pour la liberté d’information dont il était le directeur depuis avril 2008, estimant qu’il ne lui était plus possible de travailler dans un climat de liberté.
L’ancien responsable de RSF avait notamment dénoncé «le patron d’Al-Jazeera et d’autres personnes qui n’ont aucune envie d’un organisme indépendant et qui veulent lier le Centre aux intérêts diplomatiques ou politiques du Qatar».
La principale mission du Centre est de porter assistance aux journalistes en danger. Il a été créé à l’initiative de Sheikha Mozah, l’épouse de l’émir de Qatar, et de RSF en décembre 2007.
RSF s’était dit à l’époque «consterné par l’attitude des autorités qataries qui n’ont pas véritablement joué le jeu, empêchant le Centre d’acquérir son indépendance», et avait relevé que «Robert Ménard et son équipe ont été pris à partie dès lors qu’ils ont dénoncé les manquements à la liberté de la presse au Qatar».

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