Multiplexe Le Mégarama dans le collimateur

Aux abords du Mégarama, rien ne laisse présager que des bruits courent que le multiplexe s'essouffle. Et ce bruit n'émane pas uniquement des films projetés, mais des réclamations des clients. Considéré comme le plus grand complexe cinématographique d'Afrique, le cinéma aux 14 salles a ouvert ses portes en 2002. Devenu le coin favori des jeunes et moins jeunes, les amoureux du 7e Art s'y rendent pour profiter d'une programmation riche en films internationaux, nationaux ou encore évènements musicaux. Depuis plusieurs mois, les habitués des salles sont confrontés à quelques tracas comme le manque d'hygiène au niveau des salles, des problèmes techniques ou encore des soucis avec le personnel. En effet, en juillet dernier, Meriem en a fait les frais : «Je suis allée à une séance de 23h30 avec 3 amis et la vendeuse nous donne deux billets et tarde à émettre les deux autres», explique la jeune fille surprise par l'hôtesse. « Nous pensons tout de suite à un problème de monnaie, mais il n'en est rien puisqu'elle nous répond : «désolée le système est fermé je ne peux plus émettre de billets « », continue la même source encore choquée par la réaction de la vendeuse qui, apparemment ne fournissait aucun effort pour trouver une solution.

« Ce qui nous a le plus choquée, c'est qu'elle ne s'est jamais excusée ou n'a cherché à trouver de solutions. Impossible de nous rembourser, elle a juste proposé que nos deux amis fassent autre chose en attendant qu'on ait vu le film ». Au Mégarama, le personnel va encore plus loin jusqu'à en venir aux mains. « Le samedi 13 août 2011 à 13h devant le guichet de vente des tickets, je me suis assuré auprès de la caissière que la salle était climatisée, sa réponse était affirmative », explique Aimane, habitué du cinéma depuis ses débuts. « J'ai été alors surpris de voir qu'il n'y avait pas de climatisation. J'ai donc tenté d'alerter l'ouvreur. Ce dernier, de façon très impolie et avec un langage insultant, m'a fait comprendre que je n'allais pas être remboursé et qu'il fallait que je change de film», continue Aimane. «Face à cette situation, j'ai tenté de parler à un responsable, en vain. C'est là que tous les vigiles se sont rués vers moi et m'ont plaqué contre le mur, m'ont menacé d'appeler la police me menaçant de témoigner contre moi». Une expérience des plus traumatisantes pour le jeune qui ne demandait qu'à voir un film pour se détendre.

De plus, témoigne un autre client, «Dans la régie, on entend les techniciens parler à haute voix, lumière allumée, ils ne se gênent pas. Normal, ils ont vu le film une centaine de fois». Un personnel qui ne fait qu'extérioriser parfois le ras-le-bol de la situation précaire dans laquelle il travaille. L'un d'entre eux révèle que travailler pour le coin « in » de la capitale n'est pas toujours chose facile : «Les gens se plaignent constamment, il n'y a pas un jour qui passe sans qu'on se fasse agresser par quelqu'un, c'est épuisant » explique le salarié. « Le problème de climatisation est la principale revendication, les problèmes techniques restent rares ».

En plus des soucis avec un personnel considéré comme impoli et incompétent mais qui s'avère être impuissant et dépité par des remarques incessantes, le Mégarama souffre de déficiences techniques qui se font de plus en plus fréquentes. Coupure de courant, problèmes d'image et de son, les habitués de cet endroit sont de moins en moins satisfaits. « J'ai été choquée de voir qu'une des salles, la plus petite je crois, ressemblait à un dépotoir ! Le ménage n'avait pas été fait ! » témoigne Nadia qui avait décidé d'emmener son petit garçon voir un film.

« Dimanche dernier, je vais voir Harry Potter mais malheureusement le son était à peine audible et l'image sans relief. Le film a été coupé avant la fin et nous avons du attendre 20 minutes avant la reprise » reprend Imane. Quand à Mehdi, il s'est retrouvé confronté à un problème d'un tout autre genre: « Nous avions prévu une soirée cinéma un samedi soir, et surprise, en arrivant, pas de lumière, panne d'électricité et juste au Megarama! ». Une panne que le responsable marketing du multiplexe, Jamal Mehyaoui explique : «Nous avons eu un petit souci de courant pendant le Ramadan, ça arrive à tout le monde». Un problème de courant qui ne se serait déclaré qu'une seule fois en dix ans d'après le responsable. «Je reçois des réclamations tous les jours mais elles ne représentent que 1% des entrées que le multiplexe réalise. En effet, le Mégarama a fait 1 million d'entrées en 2010 et les clients se plaignent comme ils se plaindraient pour n'importe quel centre de loisirs mais ils n'en demeurent pas moins minoritaires. « Les réclamations concernent majoritairement la climatisation, le personnel ou l'état des salles mais on ne voit les choses que dans un sens », explique M. Mehyaoui. « Les clients font souvent preuve d'un manque de civisme, pour certains il fait trop chaud, pour d'autres trop froid et il faut voir aussi comment certains se comportent avec les hôtesses d'accueil », ajoute le responsable. Il semblerait donc que les clients qui se plaignent soient minoritaires et que ces derniers se permettent de fumer dans les salles, parler à haute voix pendant la projection des films et pire encore saccager le matériel. « Les toilettes sont cassées, les fauteuils salis par les pieds de certains clients», témoigne M. Mehyaoui qui soutient que les efforts doivent être réciproques. A qui donner raison quand chacun des partis soutient qu'il n'a causé aucun tort ?

Les anecdotes sont certes différentes mais se rejoignent sur le fait que le Mégarama n'est plus ce qu'il était. Un constat dont David Fraucier, directeur du multiplexe est conscient : «Le Mégarama existe depuis 10 ans maintenant, c'est normal que le matériel soit détérioré», explique le responsable du multiplexe qui fait un chiffre d'affaire de 50 millions de dirhams. «On change la moquette et les fauteuils au fur à mesure et on va passer au numérique à la fin de l'année», précise David Fraucier. Une affirmation vite démentie par le personnel : «Cela fait des années qu'on promet aux gens que ça va changer mais rien n'est fait», ajoute le salarié qui n'a plus aucun espoir.
Pourtant, le cinéma ne souffrirait en aucun cas du développement des DVD piratés puisque selon le responsable, le Mégarama fait de plus en plus d'entrées. Pourtant les tensions sont là et les deux parties se plaignent. Entre des clients insatisfaits et des responsables focalisés uniquement sur l'aspect commercial, il faudra bien trouver un équilibre si l'on veut sauvegarder un des derniers «temples» du cinéma de la métropole.

Le monopole sera bientôt de l'histoire ancienne

Grand projet de la rentrée, l'inauguration du Morocco Mall permettra de faire la connaissance du plus grand complexe cinématographique d'Afrique avec le Cinéma Imax en 3D détrônant ainsi la suprématie du Mégarama. Imax corporation, leader mondial de la technologie numérique spécialisé dans l'image cinématographique, a signé un accord avec Al Amine investissement immobilier, promoteur du projet du centre commercial. Cette nouvelle salle pourra donc projeter tous les films qui auront été convertis ainsi que les productions originales Imax en 2D et 3D. Une pellicule Imax est très différentes d'une pellicule traditionnelle 35 mm : elle mesure 70mm et elle est donc deux fois plus haute. L'image ne bouge pas du début à la fin. Quand on regarde un film en 35 mm, il y a toujours de petits tremblements, de petits défauts. Avec la pellicule traditionnelle, il n'y en a aucun. Ce sera donc un régal pour les yeux et un véritable spectacle quand d'ici à peine deux ans on pourra se divertir au Morocco Mall, dans une salle de cinéma unique au Maroc. Plus longue : Chaque image est en réalité multipliée par dix.

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